Now Lebanon,
Mars 2013
C’est
sur les planches du Théâtre Madina que la Beirut Dance Company présente son
nouveau spectacle de danse contemporaine : un.re(a)lating ; sous la
direction artistique et la chorégraphie de Nada Kano qu’ il n’est plus indispensable
de présenter.
C’est
un spectacle ambitieux porté par les danseurs Chadi Aoun, Léa Chikhani, Daniel
Balabane, Julie Dernigoghossian, Sara Karam, Kim Baraka et Maya Nasr.
C’est
sur un thème qui traite de la vision
floue entre la réalité et la non-réalité que Kano a composé.
Ce
thème est d’ailleurs actuel, puisque quand on l’interroge sur son choix, elle
explique que nous nous confrontons constamment au problème de communication
avec l’autre. La difficulté de s’expliquer est grande et les ambiguïtés encore
plus. « (…) J’ai choisi de m’exprimer à travers la danse, le mouvement, et
ce qui importe c’est ce que tu as vu et non pas ce que j’ai voulu dire
(…) »
C’est
sur cette complexité apparente que la chorégraphie
se dévoile, riche, compliquée et inventive. Les corps s’imbriques les uns dans
les autres, sur, sous… c’est très physique, athlétique même !
Bravo
pour la dextérité dans le geste. Des heures de travail apparaissent derrière
cette réalisation. Nous saluons les danseurs pour leur courage et pour le
résultat.
Le
spectacle se veut sobre en couleurs
et graphique sur fond de décor dénudé.
Choix approprié puisqu’il met en valeur les corps des danseurs, musclés et
beaux à regarder.
Le show débute à 21h au lieu de 20h30, mais nous sommes au Liban me diriez vous. Une vidéo-projection
de Cynthia Raphael inexistante sur scène est annoncée dans le programme ce qui
reste une petite déception.
L’éclairage,
la musique et les
costumes sont honnêtes.
L’entrée
en scène et
la sortie sont peu convaincantes.
La première partie est costaux mais un peu trop longue et
répétitive. On est bombardés de portées alternées, du début jusqu'à la fin, au
point de s’en lasser. On a envie de les voir faire autre chose.
La
deuxième partie enfin entamée, est plus intéressante
au niveau sonore et visuel et elle
accroche mieux. Les talents vocaux de Daniel
Balabane auraient pu être mieux exploités, bien qu’il apporte un brin de
modernisme à la musique.
On est séduit par le solo de Sara Karam. Elle a une belle présence
et elle dégage. On sent qu’elle prend plaisir à la danse. Son passage est
poignant.
La
troisième partie est plus aéré et plus dansante. Le
couple s’en sort, il y a une synergie, mais ça reste une exécution de gestes
successifs sans émotion vrai.
C’est d’ailleurs le faible des élèves de Kano qui ont du mal à se lâcher. Ils sont
sans aucun doute perfectionnistes au niveau de la technique mais ils s’y emprisonnent.
Un danseur n’est pas uniquement un technicien,
mais est avant tout une personnalité, un charisme, qui hypnotise le public et
lui enflamme le cœur.
La
technique des danseurs est basée sur le travail de la
danse classique ce qui est une aubaine dans le paysage Libanais de la danse, où
l’on voit beaucoup de n’importe quoi…
On ne peut pas nier le labeur de Kano et sa
détermination, au fils des années, 10
ans déjà, à créer une troupe de danseurs Libanais de niveau.
La route est longue est jonchée de difficultés
dans un pays ou le gouvernement n’est pas capable de soutenir de tels projets.
Mais sa force de caractère, son amour pour la danse et la volonté de ces élèves
lui ont permis de réaliser un beau parcours. Ces spectacles ont toujours été
conceptuels et dans l’air du temps, souvent teintés de tragique.
Ce
tragique qui transparait, comme un fil conducteur dans
son œuvre. On le retrouve aussi dans ce spectacle, comme une signature
personnelle. « Sans le tragique, nous n’avons rien à dire »
affirme-t-elle. « Dans ce pays, c’est une bataille journalière pour casser
les mentalités face à la danse. » Nada en a souffert comme tout danseur
qui rêve de monter sur scène. C’est sa rage contre cela qui la fait avancer
dans son combat.
Son public le lui rend bien. Celui de la
première a été attentif durant la représentation et a sans aucun doute aimé le
spectacle puisqu’il l’a ovationné. Les applaudissements ont été couronnés de
« Bravo » énergiques et venant du cœur.
Déborah Phares
Lien de l'article en arabe: http://mme.cm/DLXN00
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